Bonpas
Chartreuse de Bonpas
Le rocher qui s'élève sur la rive droite de la Durance, à neuf kilomètres d'Avignon, avait au Moyen-Age une grande importance stratégique. Dominant la rivière en un point aisé à franchir, il commandait aussi la route.
Le passage donnait lieu à la perception d'un péage important dont, en 1166, l'évêque d'Avignon cède la moitié " aux maîtres et hospitaliers ou constructeurs du pont de Maupas ", tout en se réservant la seigneurie (dominium) du pont et le droit d'y construire, ainsi qu'aux alentours. Dès lors Maupas fut appelé Bonpas.
Le pont de Bonpas était donc antérieur de plusieurs années à celui que, sur l'impulsion de Frère Bénézet, on devait jeter sur le Rhône en face d'Avignon. Mais, dans la première moitié du XIIIe siècle, le comte de Toulouse Raimond VII s'empara de la " maison du pont de Bonpas ", ainsi que du pont, et fortifia celui-ci dès 1241. Les " frères de la maison du pont de Bonpas " ne purent donc plus assurer le passage de la Durance que par un bac (navis) qui aboutissait au " port " installé sur les graviers de Noves. En 1278, ils s'unirent aux Hospitaliers, mais au début du XIVe siècle, Bonpas était tombé en fait sous la domination des seigneurs de Noves qui enlevaient les pierres de l'ancien pont sous prétexte d'en construire un nouveau.
En 1317, Bonpas devint propriété de l'Eglise, en vertu d'une cession par les Hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem de toutes leurs possessions dans le Comtat. Le pape n'eut garde de négliger un site dont l'importance stratégique et économique ne pouvait lui échapper. Aussi, dès le début, fit-il entreprendre des travaux considérables à Bonpas qu'il céda ensuite en 1320 aux Chartreux, à condition qu'ils y bâtiraient une église et un monastère ; il réserva toutefois à l'Eglise romaine le " port " sur la Durance, c'est-à-dire le passage, dont la Chambre Apostolique devait percevoir les revenus. Le pape aida les Chartreux de ses deniers.
La nouvelle Chartreuse, terminée probablement vers 1334, commanda désormais la route de terre et la traversée de la Durance ; elle formait une position avancée d'Avignon et assurait le passage paisible des voyageurs et des pèlerins. Quelques passages notables sont alors à signaler : celui de Philippe VI de Valois en 1331 ; - on envoie deux draps d'or pour décorer les bateaux qui devaient transporter le roi et sa suite ; - en 1348, celui de la reine Jeanne et, en 1362, celui d'Urbain V dont nous avons fait mention antérieurement. Lors du départ de Grégoire XI pour Rome, le cortège pontifical franchit la Durance de Bonpas à Noves le 13 septembre 1376 ; deux ou trois bateaux (navigia) avaient été envoyés la veille d'Avignon " avec les trailles et cordes nécessaires " ; en outre, le matériel habituel avait été remis en état.
La Chartreuse fut saccagée au XVIe siècle, mais les bâtiments actuels, tout en ne conservant à peu près rien de ceux du temps de Jean XXII, forment encore un ensemble des plus pittoresques. Le passage de la Durance continua à se faire par bac jusqu'à l'époque du Consulat. Un des derniers usagers notables du bac fut l'ambassadeur de la Sublime Porte qui venait renouer les relations de son souverain avec le Directoire. La traversée se fit le 12 messidor an V (30 juin 1797) ; - c'était , paraît-il, une opération toujours délicate surtout quand il s'agissait de personnages importants accompagnés d'une suite nombreuse. - Elle dura trois heures ; le premier carrosse, dans lequel se trouvait l'ambassadeur, et le second, qui transportait les secrétaires et l'interprète, passèrent sans encombre. Il n'en fut pas de même du troisième, contenant le capitaine de gendarmerie et des Turcs de la suite ; les chevaux effrayés se cabrèrent, le carrosse recula et faillit tomber à l'eau avec ses occupants ; on en fut heureusement quitte pour la peur. Les autorités avignonnaises attendaient patiemment sur la rive droite.
Un pont sur chevalets fut établi à Bonpas en 1803-1807. Emporté par une inondation en 1885, il fut remplacé par un pont suspendu qui fut à son tour détruit par bombardement en 1944 ; un nouveau pont de maçonnerie a été construit en 1949-1953. Extrait de Joseph GIRARD. " Evocation du vieil Avignon ".
Source:
Posté le 20-05-2014 16:04 par Jimre
Bonpas
Les premières mentions du site de Bonpas sont romaines et
parlent d'un oppidum.
Le pont de Bonpas, construit lui sur la Durance, relie le sud du Vaucluse au nord des Bouches-du-Rhône. Ce lieu de passage entre Caumont et Noves fut d'abord un gué sous la préhistoire.
Sous l’ère de Constantin le grand, la ville d’Arles devient
capitale d’Empire et connait une extension considérable. La ville ayant besoin
d’eau de bonne qualité, de nombreux ouvrages sont construits et une des sources
d’approvisionnement fut la source de Fontaines de Vaucluse. On construisit donc
un aqueduc capable de satisfaire les nouveaux besoins. Quoique plus modeste que
celui du pont du Gard, il n’en était pas moins un ouvrage important.
Partant de Fontaine de Vaucluse, l’ouvrage arrivait à Bonpas en s’appuyant
quand c’était possible sur les flancs des collines puis par des arcades pour
maintenir l’eau à un niveau lui permettant de s’écouler dans les plaines. Au niveau
de Bonpas, il y avait un château d’eau correspondant à un ouvrage identique de
l’autre côté de la Durance. L’eau de Fontaines traversait en siphon au moyen de
gros tuyaux en plomb, découverts il y a près d’un siècle enfouis dans le
gravier. Le passage franchi, l’aqueduc se dirigeait vers Châteaurenard pour
rejoindre en pente douce Saint Gabriel où le canal déversait ses eaux dans celui
qui amenait l’eau des sources situées sur le versant septentrional des Alpilles.
Ce quartier de Caumont-sur-Durance est un passage pour
traverser la Durance de longue date. Jusqu'au Moyen Âge, la traversée étant
très difficile, le lieu prit le nom de « malus passus » (mauvais pas). Avec la
présence de la chartreuse, les moines ont fait le nécessaire, pour des raisons
économiques et pratiques quotidiennes, pour améliorer la traversée de la
Durance à cet endroit, qui prit rapidement le nom de « bonus passus » (bon
pas).
Vers l'an 800 sont construits sur le site une chapelle et un
hôpital.
Le XIIe siècle voit l'apparition des fortifications.
L'endroit est stratégique avec son bac permettant de traverser la Durance et
appartenant à l’abbaye. Celui-ci, attesté en 1166, lui fournit d'importants
revenus. On peut également supposer avec certitude l'existence d'un pont au
passage du Maupas au XIIe siècle. Mais la violence des flots l'aurait emporté
au milieu de la seconde moitié du XIIe. La traversée de la rivière torrentielle
au Maupas devenu Bonpas, ne fut pas abandonnée. Un bac à traille est attesté
dès 1166. Paul Pansier, dans une étude sur les frères du Pont d'Avignon,
indique : « En 1166, Geoffroy, évêque d'Avignon, vend aux ministres et maîtres
et hospitaliers ou constructeurs du pont de Maupas, la moitié du péage que son
Église percevait sur le passage des pèlerins et des marchands mais se réserve
le dominum du pont et le droit d'y construire ».
Châteaubriand, dans le Livre IV, chapitre III, du Génie du christianisme
expliquait à propos des frères pontifes : « Ils s'obligeaient par leur institut
à prêter main-forte aux voyageurs, à réparer les chemins publics, à construire
des ponts et à loger les étrangers dans des hospices qu'ils élevaient au bord
des rivières. Ils se fixèrent d'abord sur la Durance, dans un endroit appelé
Maupas ou mauvais pas et qui, grâce à ces généreux moines, prit bientôt le nom
de Bonpas qu'il porte encore aujourd'hui. C'est cet ordre qui bâtit le pont du
Rhône à Avignon».
Cette Œuvre du pont fut fondée quinze ans avant celle
d'Avignon, elle avait créé un abri pour voyageurs et pèlerins leur assurant
gîte et soins, l'allusion aux constructeurs laisse supposer soit un projet
d'édification d'un pont - sous la gouverne de l'évêque d'Avignon - soit un
passage sur un pont de barques, soit une passerelle en bois, ces moyens de
passage s'étant substitués au pont de pierre emporté par les eaux de la rivière.
La commune d'Avignon concéda, en 1229, à Pierre Ruf et à
Isnard Mourre le creusement d'un nouveau canal, la Durançole ou Canal de
l'Hôpital qui déviait une partie des eaux de la Durance. Les eaux apportées par
celui-ci se déversaient dans les fossés ouest des fortifications d’Avignon, à
l'opposé de celles provenant de la Sorgue.
En 1270, Alphonse de Poitiers, accorda aux frères
hospitaliers du pont de Bonpas sur la Durance confirmation de tous les droits,
juridictions, fiefs et banalités qu'ils avaient dans le Comtat Venaissin et son
comte de Toulouse. L'acte est intitulé Privilegiam hospitaleriis Boni Passus. Un
couvent y est créé.
En 1276 la frontière est contestée, entre le Comtat
Venaissin et la Provence, au travers des revendications territoriales des
seigneurs de Caumont-sur-Durance et de Cabannes. Un arbitrage la fixe par la
ligne partant de la « cinquième pile du pont » à la chapelle du sommet de la
colline Saint-Jacques de Cavaillon. Deux ans plus tard, des chevaliers de
l’ordre de l'Ordre de Saint-Jean de Jérusalem s'y installent.
Vers 1278, des moines de l’ordre des hospitaliers de Saint-Jean
de Jérusalem s’installent à Bonpas mais le pont de pierre ne fut pas
reconstruit. Au XIIIe siècle et au XIVe siècle, les textes n'en font jamais
mention. Mais ceux attestant l'existence d'un antique pont de pierre se
trouvent dans les Lettres Communes de Jean XXII. L'une, en 1316 autorisait les
chevaliers de Noves à utiliser les pierres d'un ancien pont pour tenter d'en
construire un nouveau. Projet qui échoua puisque la bulle de ce même pontife
fondant la Chartreuse de Bonpas, en 1320, ne mentionnait qu'un bac et un port.
Par contre une Lettre, datée de 1329 faisait à nouveau allusion à un « pontem
antiquum » détruit à cet endroit.
Ceci n'empêcha point la maison hospitalière de Bonpas de
continuer son œuvre en assurant la maintenance d'un bac à traille.
En 1318, Jean XXII, pape installé à Avignon, prend le monastère
et le cède aux chartreux.
En 1372, le cardinal Philippe de Cabassolle y est inhumé.
Au XVe siècle, Hugues de Saint-Martial y est prieur
commendataire.
La chartreuse connut la prospérité au XVIIe siècle, époque à
laquelle fut élevée la salle capitulaire.
En 1688, l'Assemblée des États de Provence demanda à Louis
XIV l'autorisation de reconstruire le pont en utilisant les anciennes piles
encore existantes. Mais ce ne fut qu'après la Révolution que le principe d'un
pont en charpente de melèze fut adopté. Commencé en 1804, sur les plans de M.
Duvivier et sous la surveillance de Pierre Bondon, cet ouvrage long de 546
mètres possédait quarante-sept travées et fut ouvert à la circulation en 1812.
Le 18 messidor de l'an 1 (6 juillet 1793) la garde nationale
pris position afin d'interdire à une insurrection royaliste de franchir la
Durance. Alors que la garde nationale se repliait, un enfant de 13 ans, Joseph
Agricol Viala, se saisit d'une hache et attaqua le cordage du bac afin
d'empêcher le passage des royalistes. Viala fut abattu dans la bataille mais
permit à la garde nationale de se replier. L'enfant devint une figure de la
Révolution française et à Avignon, une fête civique fut organisée le 30
messidor.
Le 25 avril 1814, alors qu'il était en route vers l'île
d'Elbe, Napoléon après avoir quitté Avignon, passa sur le pont de Bonpas. Il
fit arrêter son équipage et, prenant sa lunette de campagne, regarda la
chartreuse. Il dit alors : « Dans un autre siècle, un caprice du destin
m'aurait peut-être jeté dans ce cloître ; là encore, je me serais fait une
place. Le catholicisme remuait alors le monde ; toutes ces congrégations de
moines étaient autant de régiments, on pouvait en devenir le chef ».
Une forte crue, en 1886, ayant emporté neuf arches, le Conseil
Général de Vaucluse fit alors appel à Ferdinand Arnodin qui était en train de
restaurer le pont suspendu d'Avignon. L'ingénieur fit remplacer, en urgence, le
tablier en lançant une travée de 103,65 mètres de long, montée sur des pylônes
en bois15. Mais le pont en bois restait fragile face à chaque crue du
gigantesque torrent. La décision de faire édifier, en aval, un pont suspendu de
« type Arnodin » fut adoptée. Ce pont fut lancé et inauguré en 1894, il
mesurait 520 mètres de long et reposait sur quatre travées.
Le pont suspendu de Bonpas a été détruit en août 1944 lors de la retraite des armées allemandes. Depuis 1954, la traversée de la rivière se fait sur un nouveau pont de 500 mètres de long soutenu par douze arches. Le pont routier est doublé maintenant d'un pont autoroutier. Il est à noter que Pierrot le fou, de Jean-Luc Godard, a été tourné en 1965 en partie au pont routier de Bonpas et sur les rives de la Durance.
Cet ouvrage autoroutier a été mis en service début 1969 en
même temps que la section d'autoroute A7 de Bonpas à Sénas.Il a été conçu par
le Service Central d'Etudes Techniques (SCET)des Ponts et Chaussées ; le maître
d'ouvrage était la Sociéte de l'Autoroute de la Vallée du Rhone (SAVR) devenue
depuis la société des Autoroutes du Sud de la France (ASF); la maîtrise
d'oeuvre était assurée par la Direction Départementale de l'Equipement (DDE) de
Vaucluse; les travaux ont été réalisés par l'Entreprise BALLOT.
Cet ouvrage est constitué de deux ponts parallèles à trois
voies de circulation chacun portant un des sens de circulation de l'autoroute
A7. D'une longueur de 550 mètres, il comprend 7 travées de 72 mètres et une
demi-travée en rive gauche. Posé sur 7 piles en rivière parallèles au courant
de crue, les tabliers continus sont ancrés dans une culée massive en rive
droite et reposent sur une culée semi-enterrée en rive gauche. C'est sur cette
culée que se trouve l'unique joint de chaussée. Chacun des tabliers est
constitué d'un double caisson à inertie variable avec précontraite longitudinale
et transversale. Le profil en long reste horizontal sur la totalité de
l'ouvrage et son tracé en plan suit une courbe circulaire de 3 000 mètres de
rayon puis un arc de clothoïde côté rive gauche.
La chartreuse de Bonpas a appartenu à la famille
Olphe-Galliard de 1942 à 2004. À cette date, Jean-Claude Boisset se porte
acquéreur, la rénove et l'ouvre au public.
La chartreuse possède un caveau qui permet
de déguster des vins de la vallée du Rhône et d'autres terroirs viticoles comme
la Bourgogne, le Beaujolais, le Languedoc...
Sa chapelle du XIIe siècle est classée monument historique
Notice no PA00082016, base Mérimée, ministère français de la Culture.
Sources:
- L'Histoire de L'Isle sur la Sorgue, Des origines à 1274 de Albert Ceccarelli
Photos:
- Jimre(2010)
Posté le 01-05-2013 11:25 par Jimre