Tour de Marcuel
Tour de Marcuel
Nous vous faisons profiter d'un article de Nicolas CHAROUSSET d'Octobre 2020, trouvé sur internet sur le site de la mairie de Verfeuil
1 – Situation
La tour de Marcuel est construite sur une crête calcaire à quelques centaines de mètres du château et du village de Verfeuil. Malgré le fait qu'elle domine deux vallons (combe de Lussan et combe étroite), le panorama se limite à un axe Verfeuil-Montèze. En effet, le promontoire est ceinturé par des collines plus hautes qui empêchent de voir au loin.
Deux chemins anciens traversent ces collines en suivant les crêtes vers Lussan et sont éloignés de la tour (ancien chemin barré par la carrière et montée des oliviers vers carrière de Lugan).
2 – Sources textuelles
Deux textes du XIIIème siècle, relevés par l'Abbé Roman mentionnent Marcuel. Un diplôme entre le roi Philippe-Aguste et l'évêque d'Uzès (1211) indique Castrum Viridi-Folio, de Mercuerio, prioratum de Valle Salve (Château de Verfeuil, de Marcuel, prieuré de Valsauve).
Il est intéressant de noter que Marcuel est cité à l'égal de Verfeuil en tant que château et il n'y a pas de relation de dépendance entre Verfeuil et Marcuel.
Une reconnaissance au roi par le seigneur de Verfeuil et de Pujaut (1271) énonce Affare de Mercurio, Castri de ViridiFolio, moulindino Bez (affaire ? De Mercurio, château de Verfeuil, Moulin-Bes). L'abbé Roman traduit affare par le terme ferme mais il semble impropre. Selon une publication scientifique affare est utilisé dans le vocabulaire de la co-seigneurie (la seigneurie est détenu par plusieurs personnes).
Selon ce texte, Marcuel est dans le domaine de la seigneurie de Verfeuil.
3 – Description des vestiges
La tour n'est pas le seul vestige que l'on peut apercevoir. Plusieurs fronts de taille de carrière ont été observé à proximité. Ils ont fourni la pierre pour la construction. Au sud-ouest, barrant la ligne de crête, un fossé étroit (F sur le plan) et peu profond marque la limite symbolique du castrum.
Ensuite, en montant vers le promontoire, on devine des aménagements en terrasse dans l’éboulis puis un mur à double-parement (M) conservé sur une faible hauteur qui semble assez long et que l'on peut considérer comme une enceinte. Une terrasse sommitale (grisé sur le plan) de 25 mètres sur 17 (forme et mesure approximative) prend appuie sur le rocher au nord tandis que à l'est et à l'ouest un mur terrasse a été construit.
Au sud, un mur prolonge le rocher. L'espace ainsi dégagé est occupé par la tour au centre. Au sud-ouest, un bâtiment arasé de 7 mètres sur 5 (B) a pu être reconnu en 2015. Plus loin un tas de pierre (A) peut laisser supposer la présence d'un autre bâtiment. Un espace de circulation subsiste entre ces bâtiments et la tour.
La tour, de plan quadrangulaire, repose sur le rocher. Ses dimensions sont de 9 mètres sur 6 pour une élévation d'environ douze mètres. Elle est bâtie en moellon grossièrement équarri de petit et moyen appareil liés au mortier de chaux. Les pierres d'angles sont taillées et portent parfois la marque d'un bossage.
Des trous de boulin traversants témoignent de l'utilisation d'un échafaudage pour la construction. Les 4 archères sont surmontées par un linteau droit échancré. Quelques marches taillées dans la roche conduisent à l'unique porte située en bordure de l'angle sud-est. Son linteau et son arcature ont disparu. De chaque côté de la porte, une croix a été gravée sur un pied droit.
A part, le système de fermeture par une barre coulissante, on note l'absence de tout système défensif. Compte tenu de l'épaisseur des murs, les dimensions internes sont de 6,50 mètres sur 3,30. Une archère orientée joliment ouvragée à ébrasement simple éclaire le premier niveau.
Sur le parement intérieur, les joints tirés au fer montrent le soin apporté au décor. Un retrait dans la maçonnerie à 2,50 mètres de hauteur permettait de supporter un plancher. Ce deuxième niveau est plus élaboré que le premier. Trois baies à ébrasement simple y apportent le jour à travers une fente. Elles sont toutes bâties différemment.
La première, placée en position centrale du mur est, est couverte par une arcature en plein cintre et une voussure formée par des claveaux rayonnant. Les deux autres sur les parois opposées ont une ouverture oblique vers le sud-ouest vers la crête qui est sans doute le côté le plus vulnérable. Elles ont un linteau plat, l'une est supporté deux coussinets surmontés d'un arc de décharge cintré ; la seconde, plus sommaire, se présente sous la forme d'un carré.
On retrouve les joints tirés au fer sur les parois. Au-dessus des baies, une série de d'orifice de chaque côté laisse supposer l'utilisation de poutres pour supporter un plafond. Légèrement plus haut, une série de corbeaux taillées devaient elle supporter la charpente et son toit.
Une petite ouverture se devine au-dessus des corbeaux, elle semble conduire vers une pierre en sailli visible de l’extérieur de la tour qui pourrait être une gargouille d'évacuation ou de récupération d'eau de pluie. Les murs de la tour s'élevaient plus haut que le toit. C'est ce que l'on appelle un mur bouclier qui pouvait servir de parapet à un chemin de ronde.
4 – Interprétation
Les auteurs avaient jusqu'à présent supposés que la tour de Marcuel avait un rôle de guet et de protection pour le château de Verfeuil. La description des vestiges et l'étude des rares textes permettent d'élaborer une tout autre histoire. Désigné en tant que castrum, avec son fossé symbolique, un mur d'enceinte, sa position en hauteur, et un habitat de prestige, Marcuel a toutes les caractéristiques d'un château.
La tour avec architecture soignée, son décor varié serait alors le logis d'une élite. La datation de cet ensemble reste à faire mais pourrait être antérieure au XIIIème siècle.
Quel statut pour ce castrum ? S'agirait-il d'une seigneurie indépendante de Verfeuil ? La résidence d'une co-seigneurie ? Comment expliquer son essor puis son déclin et son rattachement à Verfeuil ?
A Allègre-les-Fumades, le castrum d'Allegre a fait l'objet d'une étude historique et archéologique complète. Ce castrum qui s'est développé entre le XIème et le XIIéme siècle et au-delà regroupait autour d'un palais, des tours résidence de co-seigneurs.
La tour de Marcuel s'inscrit dans cet essor de l'architecture castrale, nouvelle manifestation des pouvoirs locaux.
5 – Conclusion
La tour de Marcuel présente un intérêt patrimonial et archéologique certain. Très bien conservée, elle a gardé son état primitif ce qui n'est pas le cas de la plupart des châteaux qui ont subi modification, agrandissement, destruction. Aux habitants de la protéger, de participer à sa mise en valeur et à son étude.
Bibliographie
Aspord-Mercier Sophie - 1999 - Le castrum d'Allègre - Monuments du Gard, Congrès archéologique de France. 157° session Balbure Jean – 2015 – Rapport d'inventaire des sites archéologiques (DRAC)
Moreau Marthe - 1999 - Les Châteaux Du Gard - Du Moyen Age À La Révolution
Abbé Roman – 1894 - Verfeuil
Ribaldone Thierry – 2013 – La tour de Marcuel, sentinelle du château de Verfeuil, Cévennes Magazine 1746
Posté le 09-07-2024 08:44 par Jimre
Tour de Marcuel
Non loin de l'axe Bagnols-sur Céze - Alès, près de Lussan, on trouve la tour de Marcuel. Depuis son sommet, on peut apercevoir non loin le village de Verfeuil dominé par le donjon carré de son château.
Photos:
- Jimre (2024)
Posté le 26-04-2024 08:11 par Jimre